RESUME
Extrait :
« On ne manquera pas d’être frappé par la rapidité d’accélération que donne la voiture : la vitesse de 100 à l’heure est atteinte en 150 mètres environ. Celle de 120 à l’heure en 500 mètres. »
« La vitesse moyenne réalisée sur le parcours d’aller ressort à 106km,9 à l’heure. […] Sur la section Tours-Les Hunaudières, elle a atteint le chiffre de 120 kilomètres à l’heure. La consommation au cours de cet essai ressort à 23 litres aux 100 kilomètres. »
« Le silence est d’ailleurs la caractéristique principale de cette voiture. »
« On voit que nos observations se réduisent à une succession de superlatifs louangeux »
Essai BENTLEY 4L250
Retranscription de l’article paru dans La Vie Automobile du 25 septembre 1936
Auteur : Marc Chauvierre
essai bentley 4l250
CARACTÉRISTIQUES DE LA VOITURE
Moteur 6 cylindres verticaux, monobloc, de 89 d’alésage et 114 de course
Cylindrée : 4l,250.
Soupapes dans la culasse commandées par des culbuteurs au moyen d’un arbre à came unique.
Vilebrequin monté sur sept paliers.
Deux carburateurs S.U. avec silencieux d’aspiration.
Les carburateurs sont alimentés par une pompe à essence électrique.
Allumage par batterie et bobine : avance automatique avec correcteur à main.
Circulation d’eau commandée par pompe centrifuge.
Radiateur soufflé par ventilateur avec volets commandés par thermostat.
Graissage sous pression jusqu’aux pieds de bielle.
Embrayage à disque unique fonctionnant à sec.
Changement de vitesse à quatre vitesses avant et une marche arrière par trois baladeurs.
La boîte de vitesses fait corps avec le carter du moteur.
Le rapport des engrenages est le suivant : Première vitesse : 2,75 ; Deuxième vitesse : 1,73 ; Troisième vitesse : 1,24 ; Quatrième vitesse : prise directe ; Marche arrière : 2,72.
Avec le couple conique de 10,41, les vitesses correspondantes pour 1 000 tours à la minute du moteur sont : Première vitesse : 12,35 ; Deuxième vitesse : 19,45 ; Troisième vitesse : 27,10 ; Quatrième vitesse : 33,5 ; Marche arrière : 12,3.
Roues amovibles du type Rudge.
Pneus de 5,5 X 18.
Direction à vis et à écrou.
Démultiplication : 1,875 à 1.
Angle total de braquage : à gauche 41 degrés, à droite 39. Le levier de frein agit sur les freins arrière.
La pédale commande les freins sur les quatre roues par 1 intermédiaire du servo-frein mécanique.
Suspension par quatre ressorts droits. Amortisseurs hydrauliques avec réglage automatique en fonction de la vitesse de la voiture.
La pression d’huile est réglée par la boîte de vitesses.
En outre, une commande à main placée sur le volant permet de faire varier l’énergie des amortisseurs.
Installation électrique : 12 volts.
Dynamo à régulateur de tension et démarreur séparés.
Phares mixtes, route et code.
Projecteur spécial pour brouillard.
Commandes sur le volant et au centre, une manette de gaz, une manette de correcteur d’avance, une manette réglage de carburation (starter), une manette réglage des amortisseurs. Au centre du volant, bouton d’avertisseur. Sous les pieds : en dehors des trois pédales ordinaires se trouve, à gauche, un bouton de commande de l’avertisseur et le bouton du commutateur des phares route et code.
A noter qu’au moyen de la manœuvre du commutateur placé sous la planche de bord les boutons de commande de l’avertisseur peuvent être branchés sur le dispositif de phare-code (pour la circulation de nuit dans Paris ou dans des zones de silence).
Sur la planche-tablier : Un compte-tours moteur. Un indicateur de vitesse avec deux totalisateurs. Un indicateur de niveau d’essence. Un thermomètre pour la température de l’eau. .Un manomètre de pression d’huile. Un ampèremètre. Boutons de commande pour : Feux de position, droite et gauche. Essuie-glace droite et gauche débrayable à la volonté du conducteur.
Commande des auvents d’aération. Bouton du starter. Boulon des essuie-glaces.
Au centre du tableau : clé d’allumage et clé d’éclairage.
Carrosserie.
Conduite intérieure quatre places. Grand coffre arrière. Quatre portes. Carrosserie Vanvooren.
Les sièges avant coulissent sur des rails et sont instantanément réglables en position.


En réalité, j’ai effectué avec cette voiture deux essais successifs : le premier, dont on verra l’itinéraire ci-dessous, ne m’a pas permis de mettre en valeur les possibilités de la voiture en raison de l’encombrement des routes et du mauvais temps dont j’ai été victime pendant la majeure partie du parcours.
Nous donnons néanmoins un peu plus loin le compte rendu de cet essai d’allure essentiellement touristique.
Devant ce résultat, un autre essai a été fait sur un parcours plus rapide dans de meilleures conditions et qui a duré une journée : il a comporté un parcours d’environ 500 kilomètres. C’est à cet essai que se rapportent le graphique et les courbes de vitesses moyennes publiés ci-après (Fig 1)

L’itinéraire a été le suivant : Paris (avenue George-V), Versailles, Ablis, Chartres, Châteaudun, Vendôme, Tours, Le Mans, Nogent-le-Rotrou, Dreux, Houdan, Versailles.
Le parcours Paris-Les Hunaudières, soit 303 kilomètres, a été effectué en poussant. Au retour, entre Le Mans et Versailles, on s’est contenté d’une allure de tourisme.
La vitesse moyenne réalisée sur le parcours d’aller ressort à 106km,9 à l’heure. Le graphique de la figure 4 montre que la moyenne a été sans cesse en croissant. Sur la section Tours-Les Hunaudières, elle a atteint le chiffre de 120 kilomètres à l’heure. La consommation au cours de cet essai ressort à 23 litres aux 100 kilomètres.
Voici maintenant le compte rendu du premier essai.


Observations générales
Observations. — La moyenne réalisée au cours de cet essai n’a pas été très élevée, étant données les possibilités de la voiture : nous n’avons pas été très favorisés par le temps à l’aller ; de nombreuses averses, qui diminuaient la visibilité, nous ont obligés à marcher à allure modérée et pour le retour, la route d’ailleurs peu rapide en elle-même, était extrêmement encombrée : le retour a eu lieu le samedi 11 juillet. D’autre part, le parcours effectué était beaucoup plus une promenade touristique qu’un essai sportif. 11 n’en reste pas moins que, sur certaines sections, la moyenne a été très élevée, atteignant en certains points 120 à l’heure, sur des sections de l’ordre de 40 kilomètres.

Distance et itinéraire parcourus. — Environ 1.000 kilomètres sur l’itinéraire suivant : Sèvres, Chartres, Nogent-le-Rotrou, Le Mans, Laval, Rennes, Lamballe, Saint-Brieuc, Saint-Quay, Paimpol, l’Arcouest.
Retour par Saint-Brieuc, Dinan. Pontorson, le Mont Saint-Michel, Mortain, Alençon, Verneuil, Dreux, Versailles. Vitesse maximum chronométrée : le kilomètre a été parcouru dans les deux sens en 25 secondes (en moyenne), soit une vitesse de 145 kilomètres à l’heure.
Vitesse moyenne sur l’étape Le Mans-Saint-Brieuc : 92 kilomètres à l’heure.
Consommation. — Premier essai : Essence : 18 litres aux 100 kilomètres sur tout le parcours.
Huile : 4 litres aux 1.000 kilomètres. Consommation d’eau, absolument nulle.
Pendant tout l’essai, la voiture a été occupée par cinq personnes avec de nombreux bagages.
On remarquera, à propos de la consommation, que celle-ci est, ce qui est tout naturel, nettement moins forte pendant le premier essai que pendant le second. C’est la consommation du premier essai, soit 18 litres aux 100 kilomètres qui correspond à la consommation normale d’utilisation de la voiture comme véhicule de tourisme. La consommation de 23 litres aux 100 kilomètres, qu’on pourrait trouver élevée en elle-même, accompagne, insistons sur ce point, une vitesse moyenne de 107 kilomètres à l’heure.
A rapprocher de cette vitesse relativement élevée la consommation très raisonnable. Les carburants utilisés ont été alternativement l’Esso et l’Azur. Passons maintenant en revue, suivant l’habitude, les divers organes de la voiture.
Moteur. — Le moteur est absolument silencieux et exempt de vibrations dans tous les régimes d’utilisation depuis 200 ou 300 tours à la minute, où il tourne très aisément en prise directe, jusqu’au régime maximum utilisé de 4.500 tours.
Le silence est d’ailleurs la caractéristique principale de cette voiture.
Moteur extrêmement nerveux : un couple élevé, même aux bas régimes. Comparez plutôt les courbes d’accélération obtenues successivement en prenant les quatre vitesses et en démarrant en prise directe : la courbe de démarrage en prise directe est, somme toute, assez voisine de l’autre.
On ne manquera pas d’être frappé par la rapidité d’accélération que donne la voiture : la vitesse de 100 à l’heure est atteinte en 150 mètres environ. Celle de 120 à l’heure en 500 mètres. Je crois qu’il y a fort peu de voitures de tourisme capables d’accélérations aussi rapides.
Embrayage et transmission. — Embrayage très progressif et très doux à la commande. Boîte de vitesses parfaitement synchronisée ; même en cherchant à le faire, on n’arrive pas à faire grincer les pignons de la boîte de vitesses en changeant de vitesse. 11 y a lieu de remarquer du reste que cette manœuvre de changement de vitesse est très rare en utilisation courante. La Bentley est en effet essentielle- ment une voiture de prise directe. r\ part quelques reprises en troisième pour monter plus vite une côte, on garde la prise directe d’une façon continuelle. La boîte de vitesses est absolument silencieuse aux vitesses intermédiaires, et en particulier en troisième. 11 m’est arrivé, à deux ou trois reprises, de conserver la troisième sans m’en apercevoir… Pont arrière absolument silencieux.
Freinage. — J’ai toujours prétendu que le frein était l’organe de nos voitures actuellement le moins au point. J’ai été heureux de constater que la Bentley constituait une heureuse et brillante exception. Les freins sont en effet à la fois très puissants et parfaitement progressifs, bien que n’exigeant sur la pédale de com- mande qu’une pression très réduite : c’est peut-être d’ailleurs en raison de cette douceur de commande qu’on peut si bien doser à son gré l’effort de freinage. Grâce à la perfection des freins, on peut rouler en toute sécurité aux plus grandes vitesses.
Direction. — Très douce, de démultiplication raisonnable, sans réactions, revenant parfaitement bien après les virages, même à faible allure et en même temps très précise. Tenue de route et suspension. — Les qualités de la suspension et de la tenue de route se trouvent heureuse- ment réunies dans la voiture Bentley. Evidemment, c’est la perfection des amortisseurs qui a permis d’atteindre ce difficile résultat.
Même sans toucher la manette du téléréglage, on a une suspension très douce à faible vitesse et qui devient plus ferme aux grandes vitesses. Avec le téléréglage à main, on dispose d’une gamme complète. La douceur de commande du téléréglage est la même que celle du correcteur d’avance, si bien qu’en arrivant à l’improviste sur une section de route particulièrement mauvaise, ou devant la nécessité d’un freinage brusque, on a parfaitement le temps de modifier la qualité de la suspension si on le juge utile. La tenue de route est excellente, permettant d’utiliser toutes les possibilités de la voiture.
On voit que nos observations se réduisent à une succession de superlatifs louangeux : elles ne font que traduire la magnifique impression que donne cette excellente voiture. Contrairement à ce que peuvent penser certains de nos abonnés, les essais de voitures ne sont pas toujours l’occasion d’un plaisir complet pour celui qui les exécute. Mais, de temps en temps, et c’est le cas pour la Bentley, on a la chance de trouver une voiture de très grande classe qui approche la perfection autant qu’il est possible de le faire dans l’état actuel de la construction : et c’est là, on en conviendra, un sujet de grande satisfaction. L’essai de la Bentley ne m’a laissé absolument qu’un regret : c’est qu’il ait été trop court. Je dois ajouter en terminant, pour être complet, que la conduite de la voiture en ville est aussi agréable que sur la route : elle est d’une souplesse telle qu’on peut garder la prise directe à peu près tout le temps : pratiquement on démarre en seconde et on met en prise immédiatement après.
Henri Petit.